Page:Rattazzi - Le piège aux maris, 1865.djvu/70

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venaient d’entrer ne ressemblait en rien au bouge qu’elles avaient traversé tout à l’heure. Il était meublé avec un certain luxe, luxe banal, qu’on rencontre dans trente-six mille maisons bourgeoises à Paris. Mais tel qu’il était, il paraissait splendide par le contraste. Un tapis carré, une boiserie à baguettes dorées, un meuble en palissandre garni de velours grenat, une armoire de Boule, un superbe bureau chargé, celui-là, de beaux registres verts, à coins de cuivre étincelants, un bon feu réfléchi par des chenets de bronze doré : tel était le cadre opulent dans lequel, vêtu d’une douillette de soie noire, piquée et ouatée, cravaté de blanc, un gros diamant à sa chemise, des lunettes d’or sur le nez, de beaux cheveux blancs sur les tempes, le teint clair, la main grasse, le geste onctueux, se mouvait le noble vieillard qui avait nom Baratte le placeur, de la maison Baratte et Cie, bien connue.

Il salua, et son salut fut affectueux. Il offrit des sièges et ce fut paternellement qu’il les offrit. Il s’assit lui-même avec majesté, sans hâte, comme un homme riche pour qui le temps n’est pas l’argent. Puis, d’une voix profonde et douce, la plus belle voix du siècle,