Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v1.djvu/38

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La ſuperſtition dominante épaiſſiſſoit les ténèbres. Avec des ſophiſmes & de la ſubtilité, elle fondoit cette fauſſe ſcience, qu’on appelle théologie, dont elle occupoit les hommes aux dépens des vraies connoiſſances.

Dès le huitième ſiècle, & au commencement du neuvième, Rome, qui n’étoit plus la ville des maîtres du monde, prétendit, comme autrefois, ôter & donner des couronnes. Sans citoyens, ſans ſoldats, avec des opinions, avec des dogmes, on la vit aſpirer à la monarchie univerſelle. Elle arma les princes les uns contre les autres, les peuples contre les rois, les rois contre les peuples. On ne connoiſſoit d’autre mérite, que de marcher à la guerre, ni d’autre vertu que d’obéir à l’Égliſe. La dignité des ſouverains étoit avilie par les prétentions de Rome, qui apprenoit à mépriſer les princes, ſans inſpirer l’amour de la liberté. Quelques romans abſurdes, & quelques fables mélancoliques, nées de l’oiſiveté des cloîtres, étoient alors la ſeule littérature. Ces ouvrages contribuoient à entretenir cette triſteſſe & cet amour du merveilleux, qui ſervent ſi bien la ſuperſtition.