Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/156

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tion devenoit ſuſpecte. Alors commencèrent entre les deux nations des difputes vives, touchant les frontières. Leurs chaſſeurs fe chargeoient fouvent ; & l’on fe croyoit tous les jours à la veille d’une guerre ouverte. Heureuſement, les plénipotentiaires des deux cours parvinrent à fe concilier en 1689. Les limites des deux puiſſances furent posées à la rivière Kerbechi, près de l’endroit même où l’on négocioit, à trois cens lieues de la grande muraille. C’eſt le premier traité qu’euſſent fait les Chinois, depuis la fondation de leur empire. Cette pacification offrit une autre nouveauté. On accorda aux Ruſſes la liberté d’envoyer tous les ans une caravane à Pékin, dont les étrangers avoient été conſtamment éloignés, avec des précautions tout-à-fait myſtérieuſes. Il fut aifé de voir que les Tartares, qui s’étoient pliés aux mœurs & au gouvernement de la Chine, s’écartoient de ſes maximes politiques.

XIX. La Ruſſie obtient la liberté d’envoyer des caravanes à la Chine, et s’ouvre d’autres voies pour le commerce des Indes.

Cette condeſcendance n’infpira pas de la modération aux Ruſſes. Ils continuèrent leurs uſurpations, & bâtirent, trente lieues au-delà des limites convenues, une ville qu’on nomma Albaſink ou Jaſca. Les Chinois s’étant