Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/273

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leur vie dans l’air condensé des forêts ; qui ſe couvroient habituellement d’une couche de rocou, propre à boucher les pores de la peau ; qui couloient des jours oiſifs dans une inaction entière : ces ſauvages devoient tranſpirer fort peu & ne manger guère. Sans être réduits au pénible travail des défrichemens, ils trouvoient au pied des arbres une nourriture aſſurée, ſaine, convenable à leur tempérament, & qui ne demandoit pas une grande préparation. Si quelquefois on ajoutoit à ces dons d’une nature brute & libérale les produits de la chaſſe & de la pêche, c’étoit le plus ſouvent à l’occaſion de quelque feſtin.

Ces repas d’appareil n’avoient point d’époque fixe. Les conviés y apportoient l’empreinte de leur caractère. Ils n’étoient pas plus vifs dans ces aſſemblées que dans leur vie ordinaire. L’indolence & l’ennui étoient peints dans tous les yeux. Les danſes étoient ſi graves & ſi sérieuſes, que les mouvemens du corps ſe reſſentoient de la peſanteur da l’âme. Cependant ces triſtes fêtes, ſemblables à ces tems ſombres qui couvent des orages, ſe terminoient rarement ſans effuſion de ſang.