Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v6.djvu/210

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nairement de leur libéralité. Ce préjugé, le plus extravagant peut-être qui ait affligé l’eſpèce humaine, fit croire à la nobleſſe qu’elle ne pouvoit jamais être injuſte, quelles que fuſſent les obligations qu’elle impoſoit à ces êtres vils.

D’après ces principes, on vouloit qu’il ne leur fût pas permis de s’éloigner, ſans congé, du ſol qui les avoit vu naître. Ils ne pouvoient diſpoſer de leurs biens, ni par teſtament, ni par aucun acte paſſé durant leur vie ; & leur ſeigneur étoit leur héritier néceſſaire, dès qu’ils ne laiſſoient point de poſtérité, ou que cette poſtérité étoit domiciliée ſur un autre territoire. La liberté de donner des tuteurs à leurs enfans leur étoit ôtée ; & celle de ſe marier n’étoit accordée qu’à ceux qui en pouvoient acheter la permiſſion. On craignoit ſi fort que les peuples s’éclairâſſent ſur leurs droits ou leurs intérêts, que la faveur d’apprendre à lire étoit une de celles qui s’accordoient plus difficilement. On les obligea aux corvées les plus humiliantes. Les taxes qu’on leur impoſoit étoient arbitraires, injuſtes, oppreſſives, ennemies de toute activité, de toute

induſtrie