Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/179

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devoient ſe ménager un lieu sûr pour leur retraite. On jeta les yeux ſur la Tortue, petite iſle ſituée à deux lieues de la grande ; & vingt-cinq Eſpagnols qui la gardoient, ſe retirèrent à la première ſommation.

Les aventuriers des deux nations, maîtres abſolus d’une iſle qui avoit huit lieues de long ſur deux de large, y trouvèrent un air pur, mais point de rivières & peu de fontaines. Des bois précieux couvroient les montagnes, des plaines fécondes attendoient des cultivateurs. La côte du Nord paroiſſoit inacceſſible. Celle du Sud offroit une rade excellente, dominée par un rocher, qui ne demandoit qu’une batterie de canons pour défendre l’entrée de l’iſle.

Cette heureuſe poſition attira bientôt à la Tortue, une foule de ces gens qui cherchent la fortune ou la liberté. Les plus modérés s’y livrèrent à la culture du tabac, qui ne tarda pas à avoir de la réputation. Les plus actifs alloient chaſſer des bœufs ſauvages à Saint-Domingue, dont ils vendoient les peaux aux Hollandois. Les plus intrépides armèrent en courſe, & firent des actions d’une témérité brillante, dont le ſouvenir durera long-tems.