Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/399

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Auparavant, un coupable, vrai ou préſumé, étoit ſaiſi, jeté dans une priſon, interrogé, ſans connoître, ni ſon délit, ni ſon accuſateur, ſans pouvoir appeler auprès de lui, ou les parens, ou les amis, ou des conſeils. On lui faiſoit jurer de dire la vérité, c’eſt-à-dire, de s’accuſer lui-même, & pour comble d’abſurdité, ſans attacher aucune valeur à ſon témoignage. On s’étudioit enſuite à l’embarraſſer de queſtions captieuſes, dont il étoit plus facile au crime impudent qu’à l’innocence troublée de ſe démêler. On eût dit que la fonction d’un juge n’étoit que l’art ſubtil de trouver des coupables. On ne le confrontoit avec ceux qui avoient déposé contre lui qu’un inſtant avant le jugement qui prononçoit, ou l’abſolution, ou le plus ample informé, ou la torture & le ſupplice. Dans le cas d’abſolution, l’innocent n’obtenoit aucune indemnité. Au contraire, la ſentence capitale étoit toujours ſuivie de confiſcation : car telle eſt en abrégé la procédure criminelle Françoiſe. Le Canadien conçut facilement & ſentit vivement le prix d’une légiſlation qui ne laiſſoit ſubſiſter aucun de ces déſordres.