Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/87

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au Canada l’irritabilité du genre nerveux. Des hommes continuellement exposés à toutes les injures des ſaiſons, aux fatigues de la chaſſe, aux périls de la guerre, en contractent une rigidité de fibres, une habitude à ſouffrir, qui ſe change en une ſorte d’impaſſibilité. On dit que les ſauvages n’éprouvent preſque point les convulſions de l’agonie, ſoit qu’ils meurent d’une maladie ou d’une bleſſure. Leur imagination n’attachant aucune crainte aux approches ni aux ſuites de la mort, ne leur donne pas une ſenſibilité factice, contre laquelle la nature les a prémunis. Toute leur vie phyſique & morale les porte à braver cette mort, que tout nous apprend à redouter ; à ſurmonter cette douleur, que notre molleſſe irrite. Mais ce qui devroit nous étonner plus encore que l’intrépidité dans les tourmens, c’eſt la férocité des ſauvages dans la vengeance. On frémit de penſer que l’homme peut devenir le plus cruel des animaux. En général, ſoit dans les nations, ſoit dans les particuliers, la vengeance n’eſt point atroce chez les peuples où règnent les bonnes loix, par ce que ces loix qui gardent les citoyens,