Page:Raynal - La Cigale et la Fourmi, 1853.djvu/7

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tion et les personnages, elle tire sa mandoline et chante en s’accompagnant.)

Fille et sœur de bohémiens,[1]

Dieu m’a faite bohémienne.

Les plus grands trésors sont miens,

Car toute espérance est mienne.

Noble et puissant damoiseau

Souvent me guette au passage ;

Mais, pour me conserver sage,

J’ai la peur du filet et l’aile de l’oiseau.

REBECCA, regardant à la dérobée son neveu, qui écoute, la bouche pleine et béante. (À demi-voix.)

Cet exemple à quelqu’un profitera, j’espère ;

Autrement, un beau jour, les deux feront la paire.

ZINGARINE.

Ai-je parfois de l’argent ?

De mes doigts il coule et tombe :

Le Crésus et l’indigent

N’emportent rien dans la tombe.

Bannissons l’humanité

Du triste monde où nous sommes.

Que restera-t-il aux hommes ?

Le sage vous l’a dit : Vanité ! vanité !

(Elle termine sa chanson par un éclat de rire.)

REBECCA, d’un accent plein d’amertume.

À votre place, moi, je serais fort chagrine.

  1. L’épithète de bohémienne signifie point ici natif de la Bohème ; l’usage l’admet depuis longtemps comme synonyme d’aventurier, de nomade, etc., etc.