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ET LA RELIGION DU DANDYSME

laire une conception frivole ; l’unique souci d’occuper, coûte que coûte, la galerie et de régenter la mode ; un futile essai de singularité. C’est tout autre chose. Être dandy à son sens, c’est « aspirer au sublime ».

Le mot dandy, écrit-il, implique une quintessence de caractère et une intelligence subtile de tout le mécanisme moral de ce monde.

La doctrine du dandysme, telle que la conçoit Baudelaire, est une doctrine spiritualiste. Elle pose en principe, sans s’inquiéter des contingences, une affirmation bénévole, et elle entend que tout y soit strictement subordonné. Elle fait une réalité d’un postulat. Elle enseigne à se méfier, en Philosophie, du bon sens, en Art, de l’inspiration, en Amour, de l’instinct, en toute chose, du sentiment. Le Beau, seul, est sa loi.

Cette doctrine s’apparente au stoïcisme, parce qu’elle exige de ses adeptes qu’ils surmontent les passions vulgaires pour conquérir l’Insensibilité. Elle n’admet ni retours, ni transactions, ni défaillances. Le dandy vit devant son miroir. Cela ne veut pas dire qu’il passe son temps à s’adoniser, mais qu’il doit être héroïque sans interruption et ne jamais démentir, par un faux geste, aux yeux du monde, le masque de froide indifférence qu’il s’est composé. Il doit rester impassible, et sourire même