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CHARLES BAUDELAIRE

dans la douleur, comme le Lacédémonien, sous la dent du renard qui le ronge.

Mais ce n’est pas assez d’imposer sa supériorité aux autres, il faut devenir « un grand homme et un saint pour soi-même ». Toutes les conditions matérielles, compliquées, auxquelles le dandy se soumet, « depuis la toilette irréprochable à toute heure du jour et de la nuit, jusqu’aux tours les plus périlleux du sport, ne sont qu’une gymnastique propre à fortifier la volonté et à discipliner l’âme ».

Le dandy se trouve ainsi amené à ne considérer, en tout, que l’effort et à se faire une nécessité de l’Artifice. Ce mot d’Artifice a été mal compris. Il ne s’agit pas, ici, de l’esprit d’intrigue et de mensonge. C’est l’artifice du Génie corrigeant l’imperfection naturelle et la sauvagerie de l’instinct. C’est à cela que s’emploie la Civilisation, et la Morale ne se propose pas autre chose. Baudelaire pense que tout ce qui est naturel est abominable. Cette théorie n’a rien de subversif. Elle est contenue dans l’idée du Péché originel. Or, Baudelaire estime, après elle, que « la vraie civilisation n’est pas dans le gaz ni dans la vapeur, ni dans les tables tournantes, mais dans la diminution des traces du péché originel ».

Qu’on ne s’étonne pas, après cela, de l’impor-