Aller au contenu

Page:Raynaud - Baudelaire et la Religion du dandysme, 1918.djvu/70

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
68
charles baudelaire

chaîne qui nous rive on ne sait à quelles Forces mystérieuses et qui nous fait appréhender si l’Homme ne se leurre point en proclamant orgueilleusement son libre-arbitre et sa part d’immortalité.

Nous savons bien que Baudelaire va tout résoudre dans le sens du dogme chrétien, mais nous restons frappés de l’audace de son entreprise. Il nous a montré que le sage pouvait, sans déchoir ni démériter, dénuder la vie et assister, sans rien perdre de son prestige ni de son austère gravité, aux réflexes de l’animal humain.

Qu’il descende dans le labyrinthe fangeux des cités ou dans les replis secrets du cœur, le poète est comme le soleil :

Il ennoblit le sort des choses les plus viles.

Il épure tout à la flamme de son génie. Il prend de la boue et il en fait de l’or.

La curiosité du vice devient, chez Baudelaire, un mode d’investigation, un procédé d’enquête pour résoudre les grandes vérités, et de là lui vient, sans doute, son fâcheux mais immérité renom de perversité.

Il nous confie qu’il aimait à feuilleter des estampes libertines, les annales de la luxure enfouies dans les bibliothèques ou perdues dans les cartons des marchands. Il dit :