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Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/124

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Le bras et la tignasse s’agitèrent et, en punition de mon méfait, un coup de pied m’envoya tomber au fond de la chambre, à une place où, par hasard, je ne rencontrai pas de corps. Je demeurai là immobile, dans cet air infecté d’haleines et de vinasse, tandis que les matelots qui m’avaient amenée réclamaient à boire avec insistance.

J’essayais de reposer, appuyant la tête contre la muraille, lorsqu’une masse énorme roule sur moi et m’écrase. Je tressaille d’épouvante, je veux me redresser, mais je suis maintenue dans une impitoyable étreinte. Des yeux monstrueux sont contre les miens : des bras, des jambes de fer me saisissent et m’enchaînent les membres. Ô abomination ! Ô horreur ! je revois le rire de cette face qui bave sur la mienne. Je voulais appeler, je n’en avais plus la force, étourdie par les éclats de rire et les bruits de ripaille qui s’élevaient autour de moi. Tout à coup je sens mon corps comme défoncé par une profonde blessure… Et je ne sais plus ce que je suis devenue cette nuit-là.

À ce moment, Madame Petanera se pencha vers sa fille et, d’une voix qui voulait être basse mais que je saisis néanmoins, lui confia cette réflexion :

— Si ce c’est pas une honte, d’avoir commencé de la sorte et de faire tant d’embarras aujourd’hui.

— Moi, remarqua Polissena, je ne la trouve pas fière pour raconter comme cela ses débuts.

— Ah ! observa de son côté Betta Pedali, tout le monde connaît nos origines.

— C’est ce qui vous trompe, ma chère, repartit Madame Petanera, et, les connaîtrait-on, il est inutile de