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LES NUITS CHAUDES DU CAP FRANÇAIS

Des passagers, autour de moi, prétendaient qu’une révolte venait d’éclater au Cap.

— Bah ! disait quelqu’un, les milices auront vite calmé les révoltés.

— Détrompez-vous, fit un autre, les milices sont avec les noirs.

— Ce sont les affranchis qui ont soulevé les esclaves pour faire peur aux blancs et leur arracher l’égalité des droits, mais il se pourrait que la révolte fût plus sérieuse qu’ils ne pensent et qu’elle tourne contre ses organisateurs.

— Ah ! ah ! s’écria une voix que je connaissais, décidément je n’étais pas mauvais prophète et je n’ai pas agi en niais en prenant mes précautions.

Je me retournai, et je reconnus le docteur Chiron ; nous fûmes tous deux assez surpris de nous rencontrer ; il me fit mille questions, selon son habitude, mais je lui répondais à peine, trop brisée d’angoisse et l’esprit trop occupé pour prendre garde à ses paroles. Je l’entendis seulement qui disait :

— Il commence à faire bon rentrer en France. Voyez, les scélérats ont tenu parole : ils ont commencé à incendier le Cap.

En effet, sur trois points on voyait des colonnes d’étincelles monter vers le ciel et se fondre dans un nuage énorme de fumée et de flammes qui s’avançait sur le Duquesne.

Des débris en feu tombaient devant nous dans la mer ; quelques-uns même tombèrent à mes pieds.

Je m’étais jetée à genoux et les yeux levés au ciel :