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MATHÉMATIQUES ET MATHÉMATICIENS

Quoique les vérités mathématiques se déduisent, dans un ordre rigoureux, d’un petit nombre de principes réputés évidents, on ne parvient point à les posséder pleinement, en en suivant pas à pas les déductions, en allant toujours dans le même sens du connu à l’inconnu, sans jamais revenir en arrière sur un chemin où l’on n’a rien laissé d’obscur. Le sens et la portée des principes échappent au débutant, qui saisit mal la distinction entre ce qu’on lui demande d’accorder et les conséquences purement logiques des hypothèses ou des axiomes ; parfois, la démonstration lui paraît plus obscure que l’énoncé ; c’est en vain qu’il s’attarderait dans la région des principes pour la mieux connaître, il faut que son esprit acquière des habitudes qu’il n’a pas, qu’il aille en avant sans trop savoir ni où il va, ni d’où il part ; il prendra confiance dans ce mode de raisonnement auquel il lui faut plier son intelligence, il s’habituera aux symboles et à leurs combinaisons. Revenant ensuite sur ses pas, il sera capable de voir, du point de départ et d’un seul coup d’œil, le chemin parcouru : quelques parties de la route resteront pour lui dans l’ombre, quelques-unes même seront peut-être entièrement obscures, mais d’autres sont vivement éclairées ; il sait clairement comment on peut arriver de cette vérité à cette autre ; il sait où il doit porter son attention ; ses yeux, mieux exercés, parviennent à voir clair dans ces passages difficiles dont il n’aurait jamais pu se rendre maître, s’il ne les avait franchis ; il est maintenant capable d’aller plus loin ou de suivre une autre direction ; il entre en possession des vérités nouvelles qui