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Caractère uational et vie littéraire. 51

Même la iH-dérnstio, ce vice invétéré des Persans, coniiniin déjà au tein[)s d’Hérodote, est célébrée sans honte. Abu Nu va s profère ces vers d’une hardiesse sacrilège : () Suleïiuiln ; chante pour moi et verse inoi le vin. Ne vois-tu pas que le jour commence à poindre, enveloppé dans son voile ?

Et (|uancl le verre circule, prends le et donne le-moi. Donne moi le verre de vin de la gaieté an lieu du cri du mûeddin.

Verse-moi le vin ouvertement et sois mon copédéra«te*. Daiiïcii se plaint de ce (|ue son «chéri» est envoyé à la guerre-, Miniicihrï a écrit des vers amoureux à un jeune esclave turc^, etc.

Les exemi)ies ne font pas défaut. A côté de la poésie d’amour grossièrement sensuelle, nous avons une poésie d’amour élégiaque et sentimentale qui consiste en louanges de la beauté de la bien-aimée, en descriptions du trouble de l’amour, et en plaintes sur la cruauté de la dame — ou du jeune homme — insensible. On trouve des quatrains galants, gais, spirituels comme des madrigaux du temps de Louis XV :

Elle ressemblerait à la lune, ei elle n’avait pas des frisons noirs ; elle ressemblerait à Vénus, si elle n’avait pas un grain de beauté musqué.

Quant à ses joues, je dirais : «elles sont comme le soleil», si le soleil n’était pas sujet à des éclipses*. Par tes cils tu as volé mon cœur. Par tes lèvres tu agis en

juge et par tes cils tu agis en voleur. ’

éd. Ahlwardt no. 69.

•^

Ethé : Riulagî’s Vorliiufer und Zeitgenossen (Morgenland. Forschungen 1875).

Divan éd. Kazimir.ski no. 42.

Comme, du reste, la langue

persane n’exprime pas les deux sexes par des formes différentes, on ne sait souvent jnas quand les poésies d’amour sont adressées à une femme et quand elles ont pour objet un jeune honune. Le dernier cas n’aura pas été rare : le sâqï est souvent mentionné en expressions amoureuses. Cependant, il est encore douteux, quand il faut prendre ces

expressions au pied de la lettre, et quand on n’y doit voir qu’une formule esthétique consacrée par l’habitude.

Abu 1 Mu ?affar Na.sr NisâpUri (Morgenl. Forschungen 1875). 4*