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Page:Reclus - Amis et compagnons, 1906.djvu/10

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d’unir le monde blanc et le monde jaune, de résoudre l’antinomie de l’Europe et de l’Asie qui durait depuis l’époque des Darius et des Alexandre. C’est de la Russie, actuellement l’ennemie officielle du Japon, que nous attendons la pénétration naturelle de ces nations que l’isolement séculaire semblait avoir à jamais désunies. Les savants nous disent que l’Aîno, le paysan originaire de la terre japonaise, est le frère des moujiks russes. Eh bien ! les deux paysans de l’Orient et de l’Occident reconstitueront cordialement la grande famille d’autrefois !

Vous comprenez, mes amis, combien ces vastes perspectives doivent nous passionner et nous encourager à vivre. La cause de la Révolution russe est celle de la Révolution universelle. Jamais œuvre n’eut un caractère plus amplement international ; jamais événement d’importance mondiale ne se déroula dans un aussi vaste domaine. Tandis qu’en tous les pays du monde se constituent des partis strictement nationaux qui voudraient élever des murailles de garnisons, de douanes, de prohibitions, de préjugés et de haine autour de leur étroite patrie, voici la promesse d’une révolution nationale qui, par la force des choses, évoluera dans le sens de « la mondialité », c’est-à-dire d’une liberté réelle qui ne sera plus la prérogative de quelques blancs, mais le droit de tous les hommes, qu’ils soient blancs, jaunes ou même noirs, qu’ils soient Arbi ou Roumi, qu’ils appartiennent même à la catégorie des « ennemis héréditaires », comme les Anglais ou les Allemands. Et quand nous parlons de liberté réelle, il s’agit de celle qui assure le pain, et par conséquent la fierté, la gaieté, la hardiesse que