Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/173

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de toutes les conditions du relief et du climat.

Quant à notre ruisseau, il fut certainement jadis une large et profonde rivière. La vallée, dont les prairies et les champs occupent aujourd’hui toute la largeur, était remplie par les eaux et, sur les pentes opposées des collines se voient encore d’anciennes berges, sculptées par le courant. L’espace aérien dans lequel les arbres de la rive balancent librement leurs têtes étaient occupé, jusqu’à vingt ou trente mètres du sol, par une masse liquide énorme roulant vers la mer avec une vitesse de dix kilomètres à l’heure. C’est là du moins ce que nous ont dit les géologues, après avoir fait remuer le sol par des paysans et regardé longtemps dans la plaine et sur le versant du coteau les sables, les cailloux et les argiles charriés autrefois par le courant. La Seine, paraît-il, roulait jadis dans ses grandes crues presque autant d’eau que le Mississippi. Eh bien, notre ruisseau était puissant comme le Danube ; il eût porté des flottes, s’il eût existé