Page:Reclus - Histoire d’un ruisseau.djvu/308

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que puisse étudier le gamin de nos cités, contribue, plus qu’on ne pense, à lui faire aimer la nature. Il m’en souvient encore : lorsque des averses abondantes avaient enlevé la vase de la rigole et rempli le lit jusqu’aux bords, nous construisions nos barrages, nous enserrions le courant dans un défilé, nous le faisions se précipiter en rapides, nous formions à volonté des îles ou des péninsules. Devenus hommes, les petits ingénieurs qui pataugeaient avec tant de jubilation dans la rigole ne peuvent se rappeler sans plaisir leurs jeux d’enfance ; malgré eux ils regardent avec une certaine émotion le filet d’eau bourbeuse qui se traîne le long du trottoir. Depuis leurs jeunes années, dans l’espace d’une génération, que de débris entraînés sur ce courant visqueux ont trouvé leur chemin vers la mer ! Jusqu’au sang des citoyens qui s’est mêlé à cette boue !

De toutes les rigoles latérales les impuretés vont rejoindre le grand égout, qui souvent est le lit de l’ancien ruisseau lui-même, de