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tibet et tibétains

et l’Orient. Le nom « Pays de la Mort » a servi fréquemment à désigner le Tibet ; cependant l’isolement n’a pas été complet, car de proche en proche et pendant la longue durée des temps, les hommes, les produits, les industries, les cultes se sont propagés du pourtour vers l’intérieur, grâce à quelques chemins naturels qui se glissent dans les entailles du plateau : le long corridor, d’environ 5 000 mètres en altitude moyenne, que le haut Brahmaputra ou Yarung-Tsangbo a creusé entre les arêtes parallèles du Trans-Himalaya et du Gang-dis-ri, fut certainement la route principale que suivirent les instructeurs du Tibet.

Musée Guimet.Cl. Giraudon.

pierre sacrée du tibet
portant l’inscription mystique : « Om mani padme hum »

Habitant une contrée où l’homme rencontre tant d’obstacles à son libre développement, les Bod ou Tibétains n’ont pu vivre et prospérer dans une nature hostile qu’en acquérant une intelligence vive et sagace, prompte à s’ingénier pour la recherche de la nourriture et la défense contre le vent et la froidure. Ceux d’entre eux qu’on pourrait croire les plus favorisés parce qu’ils vivent en des vallées profondes sont au contraire les plus disgraciés, à cause de l’insuffisance d’air et de lumière : les crétins sont nombreux dans ces bas-fonds. Mais sur les plateaux fouettés des tourmentes, où les hommes se blottissent dans les trous, au-dessous du vent qui rase le sol en