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Page:Recueil de la Société d’agriculture du département de l’Eure, série 4, tome 5, 1881.djvu/443

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Bréant ne partageait pas sur ce point les idées de son ami, et n’avait point d’ailleurs comme celui-ci la vertu aimable de la paresse. Il savait sacrifier son plaisir aux nécessités du travail et se préparait à remplacer son père auquel il succéda en 1736 dans son office de receveur des Gabelles. Il en était de cette charge comme de toutes celles qui avaient pour objet la perception de l’impôt que le public payait à contrecœur. L’opinion publique était généralement peu favorable, même hostile aux collecteurs et cependant au XVIIIe siècle l’ordre, l’exactitude et la régularité avaient remplacé les déprédations des temps antérieurs, mais le mauvais renom des anciens traitants qui, disait-on, étaient chargés de recouvrer tous les revenus de l’État, sous la condition d’en rendre quelque chose, était resté dans les esprits et d’ailleurs, si le personnel et les règles de la comptabilité s’étaient améliorés, l’organisation financière était demeurée fort défectueuse. La ferme des Gabelles notamment mal assise, mal répartie, donnait lieu à de fréquentes récriminations et rendait fort délicates les fonctions de collecteur de cet impôt. Malgré le soin et la régularité qu’il apportait dans son service, malgré la douceur de son caractère et l’urbanité de ses relations avec le public, Bréant ne put éviter les attaques de la calomnie. Ce fut pour lui et pour sa famille une pénible épreuve, dont il lui fut facile de sortir pleinement justifié et nous n’eussions point relevé cet incident, si nous n’y avions rencontré la preuve de la noblesse de son caractère. Lorsque l’affaire fut terminée, qu’il eut recouvré la confiance de ses supérieurs, il lui eût été facile d’avoir la communication des lettres écrites contre lui et de connaître ses délateurs, il refusa de le faire, ne voulant pas, disait-il, avoir le sujet de haïr des personnes qui lui faisaient peut-être politesse.[1]

Bréant avait épousé le 11 janvier 1740 la fille du chevalier

  1. Éloge de Bréant prononcé à la séance de l’Académie de Rouen du 5 août 1772, par Haillet de Couronne.