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Page:Recueil de la Société d’agriculture du département de l’Eure, série 4, tome 5, 1881.djvu/448

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dirés sans doute que je finis trop tard cette folie qui est de beaucoup trop longue, mais je m’en suis aperçu trop tard et il est trop tard pour l’abréger.[1]

Naturellement timide, Bréant n’aimait pas que le public s’occupât de lui, on lui demandait un jour de faire quelques ariettes, « je fais peu de chansons, répondit-il, et je me suis arrangé pour qu’on ne puisse pas chanter les bagatelles que je vous adresse :

Je ne fais pas d’assez bon vers
Pour les ajuster à des airs
En les chantant on les publie
Sans peine on les retient par cœur
Et moy je veux pour mon honneur
Qu’on les cache et qu’on les oublie.[2]

Mais sa timidité augmentait encore et il se troublait surtout quand il s’agissait de se trouver en présence d’une assemblée nombreuse, comme celle de l’Académie de Rouen, par exemple. Le 6 août 1766, une séance publique devait avoir lieu, du Boullay le pressait de s’y rendre pour donner lecture de son poème sur la peinture, mais cela ne lui allait guères. Il alléguait toutes sortes de prétextes pour s’en dispenser. « J’ai tant de chaînes, disait-il, qu’il y en a toujours quelqu’une dont je ne saurais me débarrasser ».[3]

Ce n’était pas qu’il n’eût un violent désir d’assister à cette solennité littéraire qui l’eût vivement intéressé, mais il eût voulu s’y présenter en simple spectateur et non comme acteur. « Mille raisons me font désirer de pouvoir me rendre à Rouen pour le six du mois prochain, j’en ai beaucoup moins de demeurer à Bernay, mais ces dernières sont si fortes que j’ai grand peur qu’elles ne l’emportent. Je serais enchanté de

  1. Lettre de Bréant à Formont de février 1758.
  2. Lettre de Bréant à Madame de Bouville en 1758.
  3. Lettre de Bréant à du Boullay de juillet 1766.