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Page:Recueil de la Société d’agriculture du département de l’Eure, série 4, tome 5, 1881.djvu/454

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que nous hasardons ici n’est donc point dénuée de vraisemblance.

Comme poète, les débuts de Bréant furent assez heureux pour être remarqués, on dit même que deux odes qu’il composa en vers de cinq syllabes sur le Printemps et l’Été étaient d’un vers si facile et si élégant que le public, en les comparant avec celles que Bernard avait faites sur l’Automne et l’Hiver, resta indécis sur le mérite des deux auteurs. Loin d’en être jaloux, Bernard, qui jouissait déjà d’une certaine réputation et que ses poésies légères avaient fait surnommer le Gentil Bernard, prit au contraire Bréant en affection et le compta de ce moment au nombre de ses amis.

Citons en passant un épisode qui se rattache à ce premier essai de notre auteur. Il avait conservé à Rouen de nombreuses relations avec lesquelles il était en correspondance et notamment avec Madame de Bouville, femme d’un conseiller au Parlement de Normandie, qui s’occupait aussi de littérature et faisant agréablement les vers. Il lui envoya ses deux odes sur le Printemps et l’Été avec celle de Gentil Bernard sur l’Automne. L’envoi était accompagné d’un billet en vers, se terminant en forme de traite à vue sur Mme de Bouville :

Il vous plaira me satisfaire
Pour la valeur de mon envoi.
Deux couplets en feront l’affaire
C’est peu pour vous, beaucoup pour moi.

Mme de Bouville était femme d’esprit, elle se garda bien de laisser protester la traite, envoya les deux couplets et répondit sur le même ton :

« Je vous donne advis par la présente, Monsieur, que j’ai reçu la lettre de facture y joint l’envoy charmant que vous m’avez adressé. L’un et l’autre m’ont semblé du meilleur alloy. Je voudrois pouvoir vous en payer comptant la valeur, mais n’ayant pas les fonds nécessaires pour l’acquitter, il