Page:Recueil des Travaux de la Société libre de l'Eure, tome 3, 1842.djvu/441

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servation se rencontre-t-il souvent dans les hommes les plus illettrés, chez lesquels il témoigne d’une franche admiration pour les beautés naturelles.

L’entomologiste classificateur est tout différent : il vit au milieu des livres et accepte généralement comme prouvés tous les faits qui y sont consignés, ou plutôt il s’en inquiète peu. Un coléoptère a-t-il quatre ou cinq articulations aux tarses, voilà pour lui la question capitale. Il écrira des volumes pour prouver que tel qui paraît avoir quatre segments, en a réellement cinq ; seulement le cinquième n’est pas visible, voilà tout. Il se soucie médiocrement des affinités réelles des espèces entre elles et de la conformité de mœurs ou d’habitudes par laquelle la nature semble avoir voulu les rapprocher ; pour lui, la vie même est une faculté accessoire : il n’étudie que des cadavres.

Enfin il y a l’entomologiste vulgairement nommé amateur, à qui le ciel n’a départi qu’une seule étincelle du feu sacré. Il ne recueille que les insectes les plus brillants, ne se tourmente nullement pour trouver leurs noms et leurs genres, et emploie tout son temps et tous ses soins à les disposer avec la symétrie d’un maître d’hôtel, dans des cadres élégamment dorés qu’il append dans sa chambre à coucher, au-dessus du piano ou de la causeuse.

Le véritable entomologiste échappe rarement à quelques-uns de ces défauts ou, s’il l’on veut, de ces ridicules. Seulement, ce qui est pour les autres un but, n’est pour lui qu’un moyen. Il rassemble les faits connus, cherche à en découvrir de nouveaux, les groupe en mille manières diverses et en extrait des idées d’une fécondité que ne soupçonnent pas ceux qui sont étrangers à ces mystères. Il étudie les mœurs avec attention et curiosité, mais sans être poursuivi par ce besoin de trouver des mi-