Page:Recueil des Travaux de la Société libre de l'Eure, tome 3, 1842.djvu/442

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

racles qui dévore incessamment certains faiseurs de livres : car il sait que la nature est assez grande par elle-même pour que ses merveilles n’aient pas besoin d’être exagérées ; mais il sait aussi que cette belle simplicité dérobe souvent la perfection de ses œuvres aux yeux de l’observateur inattentif. Aussi, un brin d’herbe ployé, une écorce tuméfiée, un trou dans le sable, tout est pour lui matière à réflexion. Cette réflexion ne l’abandonne pas même dans ses recherches de simple chasseur : car il a éprouvé qu’elle le dirige mieux que le hasard ; aussi trouve-t-il souvent une abondante récolte en restant patiemment courbé là où d’autres ont passé en courant. Se hasarde-t-il à publier le résultat de ses investigations, il dédaigne ces descriptions isolées de genres ou d’espèces nouvelles qui font presque toujours sacrifier la science à la satisfaction d’une puérile vanité, et il aime mieux donner son nom à des idées qu’à des insectes. Enfin, qu’il parcoure les champs ou qu’il reste dans son cabinet, qu’il tienne les filets ou la plume, l’entomologie est toujours pour lui à la fois une étude et un délassement, un travail et un plaisir.

J’aurais pu vous parler de ces susceptibilités ombrageuses, de ces polémiques aigres-douces, de ces discussions de priorité, petites jalousies et grandes vanités, auxquelles l’entomologiste paye tribut comme tout le reste des savants, genus irritabile ; mais tout cela a été dit cent fois et mieux que je ne pourrais le faire. J’aime mieux le suivre maintenant dans sa vie sociale, et vous raconter ses tribulations publiques et ses joies privées.

Il n’est guère de ville, grande ou petite, qui ne recèle au moins un entomologiste ; et comme il est généralement peu soucieux de son accoutrement, comme il pousse quel-