Page:Recueil des Travaux de la Société libre de l'Eure, tome 3, 1842.djvu/446

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N’attendez pas au reste que j’entreprenne de vous dénombrer un à un les mille petits bonheurs de cette race privilégiée. Mes collègues qui s’inquièteront peu que je vous aie dévoilé leurs ridicules en crayonnant quelques caricatures dans lesquelles aucun d’eux ne se reconnaîtra (par la bonne raison d’ailleurs que je n’ai pas eu en vue aucun d’eux en les traçant), ne me pardonneraient peut-être pas une divulgation trop complète de leurs joies intimes. Faites-vous entomologiste, si vous voulez avoir une idée des transports qu’excite la découverte d’une espèce ou d’un fait nouveau, si vous voulez apprécier avec quel empressement fébrile on rompt les cachets et les liens d’un envoi longtemps attendu, avec quelle avidité on lit l’ouvrage nouveau en se passionnant pour ou contre les idées de l’auteur, avec quelle satisfaction on découvre le premier un passage de Linné ou de Fabricius qui fait jaillir une lumière subite sur un point contesté : si vous voulez savoir avec quelle gaieté on supporte l’orage ou le soleil, et combien est délicieuse la tasse de lait qui ne fait pourtant que constater l’immense appétit du chasseur, quand, après une récolte abondante, il s’achemine vers son domicile le cœur plein comme la boîte qu’il porte, en rêvant à la distribution de ses richesses ; enfin, si vous voulez éprouver ce que vous chercherez en vain partout ailleurs, – un plaisir qu’alimente la passion et que ne suit point le regret.

Charles Nodier a dit quelque part : « Il y a quelque chose de merveilleusement doux dans cette étude de la nature qui attache un nom à tous les êtres, une pensée à tous les noms, une affection et des souvenirs à toutes les pensées, et l’homme qui n’a pas pénétré dans la