Page:Regnaud - Le Rig-Véda et les origines de la mythologie indo-européenne.djvu/12

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ou de sa lutte grandiose cootre le nuage au milieu de la tempête et des éclairs. Rien de plus ancien que l’intérêt pris par l’homme à ces spectacles, et les raisons en sont si visibles qu’il est inutile de les rappeler ; mais tout récent est le sentiment qu’ils provoquent en nous.

Je ne crains pas de dire que dans cet intérêt est le principe de toute religion. Cœli enarrant gloriam Dei ; c’est-à-dire, le mouvement et l’éclat des astres révèlent le dieu qui les dirige et les éclaire. Changeons un mot, disons le dieu dont ils sont la figure et l’essence, et nous aurons la formule exacte du sabéisme védique. Mais trente ou quarante siècles s’écouleront avant que l’impression devienne entièrement consciente et porte tous ses fruits, avant que l’esthétique du ciel nous pénètre et nous émeuve, avant que nous trouvions beau et troublant ce que nos ancêtres trouvaient surtout curieux ou terrible, et qu’au lieu de voir avec eux dans les différents aspects de l’éclat d’en haut les manifestations directes de puissances physiques maîtresses d’elles et de nous-mêmes, nous y admirions avant tout les plus sublimes phénomènes de la vie universelle.

Confondre des états de conscience aussi différents est un anachronisme que Bergaigue a eu le grand mérite de dénoncer ; mais loin d’avoir par là rapproché de nous le Rig-Véda, il l’en a bien plutôt éloigné de toute la distance qui sépare le panthéisme moderne, avec toutes les émotions qui lui sont propres, du déisme naïf des anciens jours, alors que le soleil surtout semblait le roi de l’univers.

Néanmoins, une contradiction apparaît entre cette conclusion, — surtout si nous allons jusqu’à nous appuyer sur elle pour attribuer aux hymnes védiques une valeur exceptionnelle pour l’explication de la genèse de la mythologie solaire, — et le principal argument qui sert de base au système de Bergaigne. Pour lui, nous le savons déjà, les hymnes védiques ont été composés en vue de la religion védique ; donc ils lui sont postérieurs ; donc aussi les idées qu’ils contiennent ne sauraient rendre compte des origines de cette religion, qui en est la mère et non la fille.

Malgré l’exemple des psaumes de David qui ont trouvé leur