Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/216

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curiosité ; avoir échappé à celui qui l’avait pris, et s’être réfugié dans les fentes du bois, dans les trous, dans les coins nombreux que présente un navire. Il pouvait trouver sa nourriture dans l’eau qui s’accumule sous la cale ; ou peut-être les crabes ont-ils la faculté de vivre simplement d’air comme les caméléons ?

Toutefois en y réfléchissant je repoussai de nouveau cette idée, que je qualifiai d’absurde ; c’était mon rêve qui me l’avait mise dans la tête ; sans lui je n’aurais jamais songé qu’il y eût des crabes autour de moi, et s’il s’en était trouvé, j’aurais mis la main dessus. Il y avait, il est vrai, dans ma cabine, deux crevasses assez larges pour qu’il pût y passer un crabe de n’importe quelle taille ; mais j’y avais couru tout de suite, et un animal d’une pareille lenteur n’avait pas eu le temps de s’échapper. C’était impossible, il n’y avait pas de bête dans ma cellule, et pourtant quoique chose avait rampé sur moi, j’en étais moralement sûr.

Quant à mon rêve, il n’y avait là rien d’étonnant : c’était la suite des impressions que j’avais ressenties pendant la tempête ; et plus j’y pensais, plus je le trouvais naturel.

En consultant ma montre, je m’aperçus qu’au lieu de dormir huit heures, comme je le faisais d’habitude, mon sommeil en avait duré seize, et je ne m’étonnai plus d’avoir tant d’appétit. Impossible