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Le Cheval sauvage

on m’apporta une lettre du propriétaire d’une plantation voisine. Elle était ainsi conçue :

« Mon cher Worfield.

« Nous parlions hier du Cheval blanc de la prairie ; un de mes gardeurs de troupeaux vient de m’annoncer qu’il l’a aperçu dans les grandes pampas qui touchent à ma propriété. Le malheur veut que je sois cloué au lit et incapable de partir en chasse ; mais vous, qui êtes valide et ne savez comment tuer le temps, pourquoi n’essaieriez-vous pas de faire main basse sur le plus beau coursier qu’il y ait au monde ? L’homme qui vous remettra ce billet vous dira où il l’a vu.

« Tout à vous.
« Manuel de Favia. »

Mon parti fut vite pris. Ce n’était pas la première fois que j’avais entendu conter merveille du Cheval blanc de la prairie. Quel est donc le chasseur, le trappeur, le marchand porte-balle, le voyageur qui a parcouru ces vastes Plaines de l’Amérique du Sud sans avoir recueilli quelque légende fantastique sur ces mustangs dont rien n’égale la vitesse ? Plus rapides que le vent, ils vont par troupes nombreuses, défiant toute poursuite. Moi-même, j’en avais vu souvent, et j’avais tenté, mais vainement, de les prendre au lasso. Seulement, celui qu’on désignait sous le nom de « Cheval blanc de la prairie » avait une particularité qui le distinguait de tous les autres : il avait les oreilles noires. Tout le reste de sa robe était blanc, d’une blancheur de neige fraîchement tombée.

C’était de cet animal étrange et mystérieux que parlait la lettre de Manuel. Comment n’aurais-je pas profité de la bonne fortune qui m’était offerte ? Com-