Page:René de Pont-Jest - Divorcée.djvu/201

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mère, tu ne nous quittera plus, n’est-ce pas ? elle les couvrait de baisers au lieu de leur répondre. C’est que la malheureuse était brisée par cette pensée que bientôt elle serait forcée de se séparer de nouveau de ceux qui lui étaient devenus doublement chers.

Un jour que, poussant sa promenade un peu plus loin que d’ordinaire, son fils l’avait entraînée jusqu’à cette grande allée où elle était tombée, quelques années auparavant, dans les bras de Paul Meyrin, au moment d’entrer sous ces ombrages maudits, l’ex-princesse Olsdorf se souvint tout à coup et s’écria :

— Oh ! pas là, avec toi ! Jamais !

Et doucement, elle fit revenir en arrière Alexandre, qui ne comprenait pas l’émotion de sa mère.

Ce jour-là, elle se dit qu’elle devait partir.

Maintenant que la santé de son enfant ne l’inquiétait plus, tout ce qui l’entourait lui rappelait trop cruellement le passé. Dans ce château dont la pitié seule lui avait ouvert les portes, elle avait reçu les représentants de la plus haute aristocratie russe ; elle avait été adulée, fêtée, dans tout ce domaine où elle n’était revenue qu’en tremblant. Comme tout cela était loin ! Elle n’était plus princesse Olsdorf et on n’osait l’appeler Mme  Paul Meyrin. Par ordre de Véra Soublaïeff, on lui avait rendu son nom de jeune fille : comtesse Lise Barineff, afin que, pour les gens appelés à la servir, elle ne parût pas être descendue de son rang social. Le respect même dont elle était constamment entourée par chacun devenait pour elle une douloureuse humiliation.

De plus, elle avait là-bas, à Paris, des devoirs à remplir envers cet autre enfant qui n’était pas moins qu’Alexandre et Tekla la chair de sa chair et l’objet de seul amour permis désormais à son cœur. Il est vrai que, presque chaque jour, Mme  Daubrel lui avait envoyé de bonnes nouvelles de sa fille, mais elle lui avait à peine parlé de sa rentrée rue d’Assas, et voilà que dans sa dernière lettre, elle lui disait : « Puisque votre fils est sauvé, revenez. » Or, si résignée qu’elle fût, quelque abandon qu’elle eût fait, sans esprit de retour, de tout bonheur