Page:René de Pont-Jest - La Bâtarde.djvu/141

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mandant fumait, à demi-couché sur un divan.

— Ainsi, lui disait Richard, vous ne trouvez pas ce tableau réussi ?

— Je le trouve trop réussi, au contraire, répondit le capitaine de vaisseau ; cette petite femme demi-nue qui lit un mauvais livre, en guettant avec terreur si on ne la surprend pas, est tout à fait expressive. C’est aussi complètement obscène que possible ! Du reste, cette toile est digne en tous points du boudoir auquel on la destine. Ne t’est-elle pas commandée par Roudina, ce gros israélite qui a fait une si grande fortune dans l’antichambre d’Ismaël-Pacha ?

— Oui, c’est bien pour lui, mais ménagez-le, c’est un client sérieux.

— C’est vraiment étrange la rapidité avec laquelle ces gens-là, depuis quelques années, ont pris tous nos vices. À part quelques familles où les mœurs restent bibliques et la probité inaltérable, les juifs nous donnent aujourd’hui l’exemple de la vie à grandes guides. Eux, si à l’écart jadis et tout aux affaires, ils arrivent maintenant bons premiers dans la politique, les lettres, les sciences, les arts, même chez les femmes. Ce sont eux qui entretiennent les filles les plus à la mode, jouent le plus gros jeu, font construire les plus beaux