Page:René de Pont-Jest - La Bâtarde.djvu/178

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Gabrielle, merveilleusement belle dans sa colère, s’était levée et se rapprochait du créole à chacune de ses paroles.

— Oui, ce que vous a dit M. de Martry est vrai ; oui, la mère et l’enfant, ou rien ! Et cela parce que c’est mon droit. Rappelez-vous donc ce qui se passait il y aura bientôt un an, à bord de l’Espérance. N’ai-je donc pas, dès vos premiers aveux, repoussé votre amour et refusé votre nom ? Ai-je donc été coquette ? Ne vous ai-je pas dit qu’il s’élevait entre nous un obstacle que vous n’oseriez renverser ? Vous ai-je menti en vous avouant plus tard que je vous aimais, que jamais mon cœur n’avait ainsi battu ? Vous n’oseriez le jurer ? Et, lorsque la mort terrible, fatale, inévitable, nous le pensions du moins, était là près de nous et que je me suis jetée dans vos bras, me suis-je vendue ? Non, n’est-ce pas ! Eh bien ! je ne vendrai pas davantage ma fille. Elle est à moi, bien à moi, rien qu’à moi ; je la garde ! Son père, il ne la connaîtra pas ; elle ne saura jamais son nom, à moins que ce nom ne soit également le mien. Vous invoquerez la loi ? Je m’y attends, mais la loi, je la connais aussi, et soyez-en certain, lorsque vous vous croirez prêt de vaincre, vous rencontrerez, entre votre enfant et vous, une bar-