Page:René de Pont-Jest - La Duchesse Claude.djvu/52

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qu’en respirant, pendant une seconde, l’air du siècle. Est-ce qu’il y a aujourd’hui des chrétiens, des juifs ou des musulmans ! Il n’y a plus que des riches et des pauvres, des intelligents et des imbéciles, des travailleurs ou des fainéants, et tu sais bien que les usuriers catholiques sont encore plus durs que leurs confrères juifs. Du reste cette confusion m’enchante, car les israélites y perdront ce qui fait leur force : l’isolement. En attendant, comme ils ont bien su se faire ouvrir à deux battants les portes que l’on fermait devant eux si stupidement ! Ils prennent joliment leur revanche, en arrivant bons premiers dans les arts, les lettres, les sciences et l’armée ! Ah ! ils rattrapent le temps perdu ! Dans un siècle, ils seront les maîtres du monde et peut-être, un beau jour, emmèneront-ils à leur tour nos fils en captivité à Babylone, pour se venger de l’oppression aveugle dont ils ont souffert pendant deux mille ans ! Vois-tu, mon cher, ces gaillards-là ne se contentent pas de faire faire des enfants à leurs écus, ils en font aussi de nombreux et superbes à leurs femmes. Et c’est une puissance cela ! Heureusement que beaucoup d’entre eux sont déjà des prodigues. Oui, il y en a qui se ruinent au jeu et pour des demoiselles, filles d’infidèles ; et les vierges d’Israël, qui sont souvent d’adorables créatures, commencent à regarder par dessus les murs des synagogues pour voir venir une couronne de noble dame. C’est un signe des temps. Communauté de vices, confusion de races !

— Tu es fou ! Alors tu épouserais une juive, toi ?

— Moi j’en épouserais deux, trois, quatre ! Jamais la polygamie ne me semblerait action moins pendable ! Du reste je prendrais pour femme une des héritières