Page:René de Pont-Jest - Le Cas du docteur Plemen.djvu/369

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malheureux à la vie duquel on attentait fût dans un état d’insensibilité complète, sans quoi il n’eût pas absorbé de bon gré et on n’aurait pu lui faire absorber, sans qu’il s’en aperçût, la potion renfermant ce poison. Il faudrait supposer qu’il eût perdu tout à la fois la vue et le goût, car l’arséniate de cuivre teint en vert éclatant tout liquide, et le palais le moins délicat n’en pourrait supporter la saveur horrible, pas plus, d’ailleurs, qu’il ne supporte celle des autres composés de cuivre.

« Mais soit, admettons un instant que M. Deblain, assoupi, plongé dans une espèce d’anesthésie ait bu ce liquide empoisonné. Est-ce que son estomac ne se serait pas révolté et n’en aurait pas rejeté une partie ? Est-ce que les douleurs atroces qu’il aurait immédiatement ressenties n’auraient pas provoqué ses plaintes, ses appels ? Est-ce que, en quelque sorte galvanisé par la souffrance, il ne se serait pas levé ou du moins n’aurait pas tenté de le faire pour trouver du secours ? Or, rien de pareil n’a eu lieu. La victime de cet étrange empoisonnement n’a jeté aucun cri, elle a été trouvée dans son lit à peine en désordre, son visage ne trahissait aucune lutte avec la mort. M. Deblain paraissait au contraire avoir passé du sommeil au dernier repos comme si la mort l’avait surpris pendant qu’il dormait, et autour de lui, ni sur son linge, ni sur ses draps, ni sur les tapis, nulles traces de vomissements, rien enfin de nature à