Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/318

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en particulier : à Mme  Bertin, à Blanche, à Jeanne, à Pierre et même aux autres domestiques ; se réservant, de plus, de surveiller le moral de Mlle  de Tiessant et de Ronçay afin de les sermonner et de les remonter aussi souvent qu’il serait nécessaire.

Cette occasion-là, hélas ! ne devait pas tarder à se présenter.

En effet, après avoir passé deux assez bonnes semaines, Éva devint peu à peu sombre, nerveuse, inquiète, plus qu’elle ne l’avait jamais été depuis son retour en France. Cependant sa maladie ne s’aggravait pas, les deux médecins de Paris l’avaient constaté à leur première visite, et comme elle s’était gardée de trahir en leur présence l’état de son esprit, ils en avaient conclu que, décidément, il ne fallait pas perdre tout espoir.

Or c’était précisément parce que les affections si dangereuses dont elle se savait atteinte semblaient enrayées dans leur marche, qu’elle se laissait envahir par un sentiment qui lui faisait honte, mais qu’elle ne pouvait dominer : une jalousie d’autant plus cruelle que son serment la désarmait pour la combattre.

Lorsqu’elle s’était crue condamnée, Mlle  de Tiessant avait accepté son sort, et, dans sa conviction d’une fin prochaine, dans sa terreur des peines éternelles qu’elle devait à sa première éducation chrétienne et que son père lui avait si brutalement rappelée, elle avait héroïquement arraché de son cœur tout amour profane, elle en avait eu la volonté du moins, pensant à ce moment que la lutte contre la