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Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/369

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core, le docteur fronça le sourcil et s’élança vers la maison pour entrer tout droit dans la chambre du rez-de-chaussée.

La pièce était presque dans l’obscurité. Il fit signe à la Bretonne d’en ouvrir les rideaux et les fenêtres, et s’approcha vivement du lit.

Ronçay dormait toujours et il fallait même que son sommeil fût bien profond, car les mouvements qui agitaient Éva ne le réveillaient pas, non plus que la crispation de sa main sur sa nuque, où cependant ses ongles s’imprimaient dans la chair.

Les lèvres décolorées de la pauvre femme s’ouvraient automatiquement avec des efforts visibles mais inutiles pour émettre un son, prononcer une parole. Sa respiration bondissait sifflante, tumultueuse, puis s’arrêtait brusquement.

Raymond souleva ses paupières exsangues dont l’occlusion était incomplète, comme si déjà certains muscles de la face ne jouissaient plus qu’en partie de leurs fonctions. Les yeux avaient perdu leur limpidité ; la cornée en était jaunâtre, l’iris terne, et la pupille réduite à une sorte de fente verticale, comme chez les félins.

— Ah ! cette fois, c’est la fin, hélas ! se dit Bernel en proie à une émotion qu’il n’avait jamais éprouvée en face d’un mourant. Je savais bien qu’une émotion trop violente la tuerait ! Allons, il me faut avoir ici du courage pour tout le monde !

Et il déplaça adroitement le bras d’Éva, mais non sans qu’elle parût s’en défendre, car ses doigts s’agi-