Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/370

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taient avec des mouvements de préhension dans le vide, comme s’ils voulussent ressaisir ce qu’on venait d’enlever à leur étreinte.

Au même instant, le grand jour, qui avait envahi la chambre, réveilla Ronçay. Naturellement ses regards se portèrent tout d’abord sur sa maîtresse. Alors, aussitôt, épouvanté, il se redressa en criant :

— Elle meurt ! Elle est morte ! Au secours !

Puis apercevant Bernel, il ajouta :

— Eh bien ! tu ne vois donc pas ! Elle étouffe ! Fais quelque chose !

Et comme le docteur, sans lui répondre, lui tendait tristement la main, il la repoussa, et, se penchant de nouveau sur le lit, il prit Mlle  de Tiessant entre ses bras, la souleva à demi, et lui dit d’une voix tendre, douce, ainsi qu’on interroge les enfants pour ne pas les effrayer :

— Éva, qu’as-tu ? Je t’en prie ! N’entends-tu pas ? C’est moi, moi, Gilbert !

Il entrecoupait chacune de ses paroles d’un baiser, d’un sanglot, d’une caresse. Il relevait les cheveux de la mourante comme pour mieux la voir tout entière. Agenouillé, il la serrait contre sa poitrine, suivant avec anxiété l’agitation de ses lèvres pour saisir un mot au passage.

Elle ne répondait pas, et cependant on eût dit qu’elle comprenait, car, à certaines paroles, une sorte de crispation se faisait sur son visage. Mais son corps demeurait inerte dans l’étreinte de celui qui l’avait si souvent fait tressaillir d’ivresse. Ses paupières