Page:René de Pont-Jest - Le Serment d’Éva.djvu/371

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restaient closes ; sa tête oscillait sur ses épaules, sa respiration s’affaiblissait visiblement.

Alors seulement l’amant comprit que l’heure des adieux suprêmes était venue. Toutefois, au lieu de se résigner à cette terminaison fatale qui, pour la martyre, était la délivrance, il fut, au contraire, saisi d’un accès de révolte contre le destin, le ciel et l’infortunée elle-même.

— Je ne veux pas que tu meures, lui disait-il, en l’enveloppant plus complètement encore. Tu n’en as pas le droit !… Ne me quitte pas, je t’en conjure ! Que deviendrais-je sans toi ? Tu ne peux pas me laisser seul, tout seul ! Tu m’entends bien ? Ah !… réponds-moi, réponds-moi ! Je t’aime toujours ! Tu ne m’aimes donc plus, toi ?… Non, non, je ne veux pas que tu t’en ailles ainsi !

Et il couvrait de baisers le front, les yeux, les lèvres, les épaules d’Éva, dont le vêtement de nuit s’était entr’ouvert et laissait voir l’horrible amaigrissement où l’avait réduite le mal qui l’emportait.

La douleur de son ami menaçait de le conduire si rapidement à la folie que Bernel se décida à intervenir.

— Gilbert, lui dit-il, en lui arrachant en quelque sorte le corps de la malheureuse, reviens à toi, sois homme au nom même de celle qui t’a tant aimé. Si elle t’entendait, crois-tu que ses derniers instants ne seraient pas plus cruels encore ! Trouves-tu donc qu’elle n’a point assez souffert ? Reste fort pour elle et pour ta fille. Voyons, du courage !