à la famille Annæa, autour de laquelle nous avons vu les chrétiens s’agiter et se grouper ; ce fut poussée par Sénèque qu’elle joua, dans la plus monstrueuse et la plus tragique des circonstances, un rôle qui, vu sa condition servile, ne peut être qualifié que d’honnête[1]. Cette pauvre fille[2], humble, douce, et que plusieurs monuments nous montrent entourée d’une famille de gens portant des noms presque chrétiens (Claudia, Felicula, Stephanus, Crescens, Phœbe, Onesimus, Thallus, Artemas, Helpis)[3], fut le premier amour de Néron adolescent. Elle lui fut fidèle jusqu’à la mort ; nous la retrouverons, à la villa de Phaon, rendant pieusement les derniers devoirs au cadavre dont tout le monde s’écartait avec horreur.
Et disons-le, en effet, quelque singulier que cela puisse paraître, on conçoit que, malgré tout, les femmes l’aient aimé. Ce fut un monstre, une créature absurde, mal faite, un produit incongru de la nature ; mais ce ne fut pas un monstre vulgaire. On eût dit que le sort, par un caprice étrange, avait voulu réaliser en lui l’hircocerf des logiciens, un être