Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 5 Evangiles, Levy, 1877.djvu/267

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toujours préoccupé de se faire aimer et admirer du monde, entendait la raillerie et la provoquait ; celui-ci n’avait rien de burlesque ; il ne prêtait pas au ridicule ; il était trop tragique[1]. Ses mœurs ne valaient pas mieux que celles du fils d’Agrippine ; mais à l’infamie il joignait l’égoïsme sournois, une affectation hypocrite de sévérité, des airs de censeur rigide (sanctissimus censor)[2], qui n’étaient que des prétextes pour faire périr des innocents[3]. C’est quelque chose de pénible à supporter que le ton de vertu austère que prennent ses adulateurs, Martial, Stace, Quintilien, quand ils veulent relever le titre auquel il tenait le plus, celui de sauveur des dieux et de restaurateur des mœurs.

Sa vanité ne le cédait pas à celle qui poussa Néron à tant de pitoyables équipées, et elle était beaucoup moins naïve. Ses faux triomphes, ses victoires prétendues, ses monuments pleins d’une adulation menteuse, ses consulats accumulés étaient quelque chose de nauséabond, de beaucoup plus irritant

  1. Philostrate, Vie d’Apoll., VII, 12.
  2. Quintilien, Inst., IV, præf. Cf. Martial, VI, 2, 4, 7 ; VIII, 80 ; IX, 7, 104 ; Stace, Silves, III, iv, 74 ; IV, iii, 213 ; Suét., Dom., 7. Le titre de censor figure dans la plupart des inscriptions et des monnaies de Domitien (Orelli, nos 766, 768 ; Cohen, I, 387 et suiv.).
  3. Dion Cassius, LXVII, 8.