Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 6 Eglise chretienne, Levy, 1879.djvu/337

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Un autre docteur hétérodoxe, Cerdon[1], parut à Rome vers ce temps. Il était originaire de Syrie, et apportait des doctrines qui différaient peu de celles des gnostiques de ce pays. Ses façons de distinguer Dieu du créateur, de placer, au delà du Dieu père de Jésus, un autre Dieu inconnu, de présenter l’un de ces dieux comme juste, l’autre comme bon, parurent malsonnantes à bon droit. Cerdon trouvait le monde une œuvre aussi imparfaite que ce Jéhovah lui-même, à qui on l’attribuait, et qu’on présentait comme sujet aux passions de l’homme. Il rejetait tous les livres juifs en bloc, ainsi que les passages des écrits chrétiens d’où il résultait que Christos avait pu prendre une vraie chair. Cela était tout simple : la matière lui semblait une déchéance, un mal. La résurrection lui répugnait pour la même raison. L’Église le blâma ; il se soumit et rétracta ses opinions, puis se mit à dogmatiser de nouveau, soit en particulier, soit en public. De là une position des plus équivoques. Sa vie se passait à sortir de l’Église et à y rentrer, à faire pénitence de ses erreurs et à

  1. Irénée, I, xxvii, 1, 2 ; III, iv, 3 ; Philosoph., VII, 10, 37 ; X, 19 ; Tertullien, In Marc., I, 2 ; Præscr., 50 ; saint Cyprien, Epist., 74 ; Eus., H. E., IV, 11 ; Chron., à l’année 140 ; Chron. d’Alex., à l’an 139 ; Épiph., hær. xli ; Théodoret, I, c. xxiv ; Philastre, c. xliv, xlv ; Pseudo-Aug., hær. 22 ; Pseudo-Tert., 16.