été assez vive ; mais on s’entendit. La question de la
Pâque n’était pas encore arrivée à maturité. Depuis
longtemps déjà, l’Église de Rome avait pour principe
de montrer à cet égard une grande tolérance. Les
conservateurs de la règle juive, quand ils venaient à
Rome, pratiquaient leur rite, sans qu’on les reprît ni
qu’on cessât de communier avec eux. Les évêques
de Rome envoyaient l’eucharistie à des évêques qui
suivaient à cet égard une autre règle. Polycarpe et
Anicet gardèrent entre eux la même mesure. Polycarpe
ne put persuader à Anicet de renoncer à une pratique
qui avait été celle des évêques de Rome avant lui.
Anicet, d’un autre côté, s’arrêta quand Polycarpe lui
dit qu’il tenait sa règle de Jean et des autres apôtres
avec lesquels il avait vécu sur le pied de la familiarité.
Les deux chefs religieux restèrent en pleine
communion l’un avec l’autre, et même Anicet fit à
Polycarpe un honneur presque sans exemple. Il voulut,
en effet, que Polycarpe, dans l’assemblée des fidèles
de Rome, prononçât à sa place et en sa présence les
paroles de la consécration eucharistique[1]. Ces hommes
ardents étaient pleins d’un sentiment trop passionné
pour faire reposer l’unité des âmes sur l’uniformité
- ↑ Irénée, lettre à Victor, l. c. Le verbe παρεχώρησε, impliquant la cession d’un droit, ne peut s’appliquer à une simple distribution de l’Eucharistie qu’Anicet aurait faite à Polycarpe.