Page:Renan - Jesus, Levy, 1864.djvu/151

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aplanir les voies devant celui de Dieu. Ce messager n’était autre que le prophète Élie, lequel, selon une croyance fort répandue, allait bientôt descendre du ciel, où il avait été enlevé, pour disposer les hommes par la pénitence au grand avénement et réconcilier Dieu avec son peuple. Quelquefois, à Élie on associait, soit le patriarche Hénoch, auquel, depuis un ou deux siècles, on s’était pris à attribuer une haute sainteté, soit Jérémie, qu’on envisageait comme une sorte de génie protecteur du peuple, toujours occupé à prier pour lui devant le trône de Dieu. Cette idée de deux anciens prophètes devant ressusciter pour servir de précurseurs au Messie se retrouve d’une manière si frappante dans la doctrine des parsis, qu’on est très-porté à croire qu’elle venait de ce côté. Quoi qu’il en soit, elle faisait à l’époque de Jésus, partie intégrante des théories juives sur le Messie. Il était admis que l’apparition de « deux témoins fidèles, » vêtus d’habits de pénitence, serait le préambule du grand drame qui allait se dérouler, à la stupéfaction de l’univers.

On comprend qu’avec ces idées, Jésus et ses disciples ne pouvaient hésiter sur la mission de Jean-Baptiste. Quand les scribes leur faisaient cette objection qu’il ne pouvait encore être question du Messie, puisque Élie n’était pas venu, ils répondaient qu’Élie était venu, que Jean était Élie ressuscité. Par son genre de vie, par son opposition aux pouvoirs politiques établis, Jean rappelait