Page:Renan - Lettres du séminaire, 1838-1846.djvu/93

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bien ma bonne mère, j’ai eu le plaisir d’aller l’entendre à Notre-Dame. L’auditoire était immense. Figurez-vous une vaste nef remplie d’une foule innombrable de personnages de tout rang, les bas-côtés, les galeries entièrement occupés, et au milieu de tout cela un seul homme, d’un extérieur assez ordinaire. Il se lève, et aussitôt le plus profond silence règne dans l’assemblée. Tous les yeux, tous les esprits étaient attachés sur lui, et on attendait impatiemment qu’il commençât son discours. Enfin un mot est sorti de sa bouche, et alors je n’essaierai pas de vous dépeindre toute l’éloquence vive et pathétique qu’il a su déployer. J’ai admiré son action vive, ses gestes énergiques, la force et la concision de ses paroles. Quelques passages ont été sublimes et ont rappelé le grand Bossuet, surtout quand il a dépeint monseigneur au milieu des cholériques et prodiguant ses soins à ceux mêmes qui, quelques années auparavant, avaient détruit son archevêché. Un endroit qui m’a encore ravi, c’est la manière pleine de délicatesse dont il a effleuré ces événements malheureux dont le récit ne fait