Page:Renan - Nouvelles lettres intimes 1846-1850, Calmann Levy, 1923.djvu/59

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lettre me ferait connaître la destination à laquelle tu les réservais. Je t’assure, chère Henriette, que la somme déposée chez les Mallet est très suffisante pour subvenir longtemps encore à mes besoins, que je fais, tu le sens bien, les plus restreints possible, sans toutefois me rien refuser du nécessaire. Les livres forment ma dépense la plus ruineuse ; le cours de M. Reinaud que je dois suivre plus régulièrement, m’a surtout obligé à des achats fort dispendieux ; les libraires orientaux sont dans l’habitude de se dédommager sur le petit nombre d’amateurs du grand nombre qui ne leur achète rien. Néanmoins, chère Henriette, n’aie sur ce point aucune inquiétude. Je te promets du reste de te le dire tout franchement, du moment où les fonds feront déficit.

Tu ne me parlais pas de ta santé dans ta dernière lettre, chère amie. Dis-moi, je te prie, si elle n’a rien éprouvé depuis la cruelle secousse qui l’a dernièrement ébranlée. Je frémis en songeant au froid terrible qui doit se faire sentir dans le pays que tu habites, et dont il ne se peut faire que tu ne ressentes plus ou moins les atteintes. Rassure-moi, je t’en prie, dans ta prochaine sur ce point le plus capital pour moi.

J’ai lu avec beaucoup d’intérêt les divers articles que tu as envoyés à mademoiselle Ulliac, et j’attends impatiemment ceux que tu lui promets encore. C’est un vrai bonheur pour moi que tes lettres se multiplient au moment même où la plus urgente nécessité m’empêche de t’écrire aussi