Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/253

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d’éloquence, n’avaient aucun succès auprès de ces sérieux chrétiens. Ils ne pensaient pas que le dogme eût besoin d’être mitigé, déguisé, costumé à la jeune France. Ils manquaient de critique en s’imaginant que le catholicisme des théologiens a été la religion même de Jésus et des apôtres ; mais ils n’inventaient pas pour les gens du monde un christianisme revu et adapté à leurs idées. Voilà pourquoi l’étude (dirai-je la réforme ?) sérieuse du christianisme viendra bien plutôt de Saint-Sulpice que de directions comme celle de M. Lacordaire ou de M. Gratry, à plus forte raison de M. Dupanloup, où tout est adouci, faussé, émoussé, où l’on présente non point le christianisme tel qu’il résulte du concile de Trente et du concile du Vatican, mais un christianisme désossé en quelque sorte, sans charpente, privé de ce qui est son essence. Les conversions opérées par les prédications de cette sorte ne sont bonnes ni pour la religion ni pour l’esprit humain. On croit avoir fait des chrétiens : on a fait des esprits faux, des politiques manqués. Malheur au vague ! Mieux vaut le faux. « La