Page:Renan - Souvenirs d’enfance et de jeunesse.djvu/437

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changeai de ton, quand il me proposa de la faire avec M. de Ravignan. J’aurais accepté ; car c’eût été finir noblement avec le catholicisme. Malheureusement M. de Ravignan ne devait être à Paris que vers le 10 novembre, et dans l’intervalle M. Dupanloup a cessé d’être supérieur du petit séminaire, et moi de faire partie du collège Stanislas. La réalisation de ce projet me paraît au moins bien ajournée…

Adieu, bon et cher ami, pardonnez-moi de ne vous avoir parlé que de moi. Pour vous et pour vos amis, je vous supplie de ménager votre santé durant la convalescence et de ne point la compromettre de nouveau par un travail prématuré. Je ne demande de réponse qu’au cas où cela ne vous fatiguerait pas. La vraie réponse sera quand nous nous embrasserons. En attendant, croyez à ma bien sincère amitié.

Paris, 5 septembre 1846.

Merci, mon cher ami, pour votre excellente lettre. Elle m’a été une grande joie et un grand secours durant ces tristes vacances que je passe dans le plus pénible isolement qui se puisse imaginer. Pas une âme humaine à qui je puisse ouvrir mon cœur, bien plus, avec qui je puisse avoir de ces conversations qui, pour être indifférentes, ne laissent pas de délasser l’esprit et de satisfaire au besoin de société. On peut être à Paris bien plus seul qu’au fond d’un désert, et je l’éprouve. Ce n’est pas de voir des hommes qui constitue la société,