n’aime pas l’empereur[1]. » Le faible Pilate n’y tint pas ; il lut d’avance le rapport que ses ennemis enverraient à Rome, et où on l’accuserait d’avoir soutenu un rival de Tibère. Déjà, dans l’affaire des écussons votifs[2], les Juifs avaient écrit à l’empereur et on leur avait donné raison. Il craignit pour sa place. Par une condescendance qui devait livrer son nom aux fouets de l’histoire, il céda, rejetant, dit-on, sur les Juifs toute la responsabilité de ce qui allait arriver. Ceux-ci, au dire des chrétiens, l’auraient pleinement acceptée, en s’écriant : « Que son sang retombe sur nous et sur nos enfants[3] ! »
Ces mots furent-ils réellement prononcés ? On n’est pas obligé de le croire. Mais ils sont l’expression d’une profonde vérité historique. Vu l’attitude que les Romains avaient prise en Judée, Pilate ne pouvait guère faire autre chose que ce qu’il fit. Combien de sentences de mort dictées par l’intolérance religieuse ont forcé la main au pouvoir civil ! Le roi d’Espagne qui, pour complaire à un clergé fanatique, livrait au bûcher des centaines de ses sujets était plus blâ-