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Page:Renan - Vie de Jesus, edition revue, 1895.djvu/557

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son père, s’il veut, vienne maintenant le délivrer ! — Il a sauvé les autres, murmurait-on encore, et il ne peut se sauver lui-même. S’il est roi d’Israël, qu’il descende de la croix, et nous croyons en lui ! — Eh bien, disait un troisième, toi qui détruis le temple de Dieu, et le rebâtis en trois jours, sauve-toi, voyons[1] ! » — Quelques-uns, vaguement au courant de ses idées apocalyptiques, crurent l’entendre appeler Élie, et dirent : « Voyons si Élie viendra le délivrer. » Il paraît que les deux voleurs crucifiés à ses côtés l’insultaient aussi[2]. Le ciel était sombre[3] ; la terre, comme dans tous les environs de Jérusalem, sèche et morne. Un moment, selon certains récits, le cœur lui défaillit ; un nuage lui cacha la face de son Père ; il eut une agonie de désespoir, plus cuisante mille fois que tous les tourments. Il ne vit que l’ingratitude des hommes ; il se repentit peut-être de souffrir pour une race vile, et il s’écria : « Mon Dieu, mon

    ils voulaient que leur maître eût été le disciple favori, lui avait recommandé en mourant ce qu’il avait de plus cher. La présence vraie ou supposée auprès de Jean de ce précieux dépôt lui donnait sur les autres apôtres une sorte de préséance, et assurait à la doctrine dont on le faisait garant une haute autorité.

  1. Matth., xxvii, 40 et suiv. ; Marc, xv, 29 et suiv.
  2. Matth., xxvii, 44 ; Marc, xv, 32. Luc, suivant son goût pour la conversion des pécheurs, a ici modifié la tradition.
  3. Matth., xxvii, 45 ; Marc, xv, 33 ; Luc, xxiii, 44.