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Page:Renard - Le Coureur de filles.djvu/216

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BAUCIS ET PHILÉMON


trépignant de fureur si, dans l’espoir de goûter au vin doux, elle lui faisait hypocritement ses offres de service. Il foulait son vin lui-même, avec ses pieds, ses pieds à lui, poudreux, crottés même si c’était son idée, et, les poings fermes au bord du tonneau, il faisait travailler activement ses vieilles jambes ligneuses, passionné, ardent comme à une tuerie, éclaboussé de taches sanglantes. La vieille rôdait autour de lui, essayait ses flatteries.

— Je crois qu’il va être bon, cette année !

— Oui-da ! tu le crois, carne ! disait le vieux, redressé, et se croisant les bras dans la vapeur d’or de la cuve, comme un lutteur en pleine victoire.

— C’est mon avis, ajoutait la vieille, encouragée, artificieuse.

— Elle dit que c’est son avis ! criait le vieux, les mains levées vers les nues, près de fondre à pieds joints sur la vieille et de s’abattre sur elle, toutes griffes dehors.